vendredi 5 avril 2013

Machisme-Léninisme


Un nouveau machisme-léninisme ?

Nous reproduisons ci-dessous un texte réalisé par une militante féministe espagnole et qui rappelle toute l’importance d’une perspective anti-patriarcale pour les processus d’émancipation et dans les organisations qui s’en réclament.

On constate depuis quelques années une nouvelle tendance parmi certain-e-s camarades de la gauche anticapitaliste. On pourrait qualifier cette tendance de « nouveau machisme-léninisme » car il constitue une réaction régressive face aux avancées et améliorations de la position des femmes dans la société.

Le machisme au sein des organisations anticapitalistes n’est absolument pas une chose nouvelle. Rappelons, par exemple, les polémiques entre Lénine et Clara Zetkin ou avec Alexandra Kollontaï (1). Le nouveau machisme au sein de la gauche radicale est la réaction de certain-e-s militant-e-s révolutionnaires face aux changements qui s’opèrent dans les rapports de genre, dans la structure familiale et, particulièrement, face à l’institutionnalisation d’un certain féminisme libéral.  Il s’agit d’une attitude idéologique qui provient directement des tripes : de la perte effective de privilèges masculins et des nouvelles exigences posées par leurs camarades femmes, dans le parti ou dans la vie.

Le machisme-léninisme se caractérise par l’acceptation abstraite du féminisme, il accepte le « travail femme » réalisé par des femmes et tolère ses camarades féministes comme un « moindre mal ». Par contre, ces militant-e-s ne s’engagent pas trop dans les activités liées à la question du genre. Ce dernier est à leurs yeux le domaine exclusif des femmes. De la même manière, et en dépit d’une formation marxiste « pointue », ces militant-e-s ne prendront jamais la peine de lire une seule page de littérature féministe marxiste (Alexandra Kollontai, Heidi Hartmann, Maria Rossa dalla Costa, Sheila Rowbotham, Giulia Adinolfi, Batya Weinbaum, Angela Davis et un long « etc. »).


Le nouveau machisme-léninisme se base sur des sources d’information variées ; depuis « L’origine de la famille, de la propriété privée et de l’Etat » (Engels), « La Femme et le Socialisme » (Bebel) et jusqu’aux articles misogynes de la presse réactionnaire de type « LibertadDigital ».

Le machisme-léninisme n’est pas « politiquement correct » ; il ne se manifeste pas au travers d’écrits publics. La question de l’égalité des genres ne mérite d’ailleurs pas un tel effort à ses yeux. De là découle qu’il s’agit d’un corpus de croyances essentiellement orales et pratiques.

Face au machisme-léninisme, nous devons revendiquer la convergence positive entre le féminisme et le marxisme, entre le féminisme et l’anticapitalisme. Notre propre tradition historique nous offre des références positives de luttes pour l’émancipation des femmes et de la classe ouvrière. Sans aller plus loin, Marx et Engels - avec toutes leurs limites – furent des pionniers dans la dénonciation de la subordination des femmes articulée par le capitalisme. 

Nous allons dresser ici un inventaire critique de l’argumentaire du nouveau machisme-léninisme. Il convient de souligner que notre intention n’est pas de qualifier tous les militant-e-s révolutionnaires de « machistes », bien au contraire. Notre propre expérience nous a démontrée la possibilité de converger et de partager des complicités avec la majorité des camarades. En conséquence, nous sommes convaincues, au contraire d’un certain secteur du féminisme post-68, que la présence de féministes dans les organisations mixtes est tout autant possible que nécessaire. C’est précisément les tares du machisme qui rendent cette unité difficile.

Passons maintenant à la critique de ces arguments…

Argument nº 1: « Les femmes ont déjà obtenues l’égalité formelle et réelle, le patriarcat n’existe plus ».

Parmi les motivations du nouveau machisme de gauche, l’idée la plus faible est sans doute celle selon laquelle « les femmes ont déjà obtenues l’égalité parce que le modèle de femme-épouse-ménagère est sans cesse plus résiduelle ». Le nouveau machisme accepte en théorie l’émancipation des femmes, leur sortie de l’espace privé, mais il a quelques problèmes lorsqu’il s’agit d’en assumer les conséquences. Les données qui démontrent que l’argument selon lequel les femmes ont déjà acquises l’égalité sont nombreuses. En voici quelques unes :


  • L’écart salarial entre les hommes et les femmes dépasse 21% en 2010 (il varie en fonction du type de contrat, de durée du travail, de l’activité productive, etc.) (2)
  • Au cours de ces 10 dernières années, le chômage féminin a atteint 11% face à 6% pour les hommes. (Enquête sur le Population Active, EPA).
  • Le taux d’activité des femmes était de 52,6% en 2010, et pour les hommes de 67, 7%. (un chiffre qui masque bien entendu le travail domestique).
  • 8,2% des foyers dont le « chef » de ménage est une femme souffrent de la pauvreté face à 1,7% des foyers dont le « chef » de ménage est un homme (2001).
  • 95,6% des personnes inactives qui ne cherchent pas un emploi pour cause de raisons familiales sont des femmes (2010, EPA).
  • 88,4% des personnes qui souffrent de violence domestique sont des femmes (chiffre de 2005, Institut de la Femme).
  • En 2010, 73 femmes ont été tuées par leur (ex) mari ou (ex) compagnon, contre 7 hommes assassinés (Chiffre de l’Observatoire contre la Violence Domestique et de Genre).
Ces données sont suffisamment claires et balayent l’affirmation selon laquelle les femmes auraient obtenues l’égalité réelle par rapport aux hommes, ce qui d’autant moins vrai parmi les femmes des classes populaires. En conséquence, il est aujourd’hui plus que jamais nécessaire que le mouvement ouvrier intègre la question des femmes travailleuse dans ses luttes spécifiques.

Argument n°2 : « Le féminisme divise la classe ouvrière. C’est une idéologie bourgeoise ».

Concernant ce second argument du machisme-léninisme, il y a deux questions importantes à préciser. Comme nous le savons tous-tes, l’origine du féminisme est le mouvement des « suffragettes » et la revendication des droits civils pour les femmes (Mary Wollstonecraft). L’origine du féminisme est donc, effectivement, « bourgeois ».

On pourrait d’ailleurs dire la même chose du socialisme précoce (Saint Simon, Fourier, Proudhon… étaient également d’origine sociale bourgeoise ou petite-bourgeoise). Cependant, l’extraction sociale des précurseurs d’un mouvement ne détermine pas inexorablement sa nature de classe future. Ce qui vaut pour le socialisme, vaut pour le féminisme. En outre, de même qu’il existe un socialisme ouvrier au XIXe siècle, il existe également un féminisme populaire à cette époque, habituellement passé sous silence. Un exemple typique est celui de Flora Tristan (1803-1844) qui a revendiqué les droits des femmes travailleuses. On peut parler d’un féminisme populaire et socialiste de manière très précoce, même s’il reste encore beaucoup de travail à réaliser du point de vue de l’historiographie afin de mettre en lumière la participation spécifique des femmes dans la formation du mouvement ouvrier. En passant sous silence ou en méconnaissant le féminisme populaire et ouvrier, on fini par faire le jeu des courants libéraux dont on prétend vouloir se démarquer.

Partant de l’identification du féminisme avec le libéralisme et la bourgeoisie, le militant machiste-léniniste considère que les luttes des femmes (en tant que genre) divisent la classe ouvrière. Les données exposées plus haut rendent évidente la réalité crue : la classe ouvrière est déjà divisée et c’est le capitalisme qui la divise car il renforce et reproduit l’inégalité entre les genres en fonction de ses intérêts. Ainsi, l’objectif du mouvement ouvrier doit être ; a) de surmonter ses propres préjugés machistes et b) d’être capable d’articuler les luttes d’émancipation car les femmes constituent la moitié des travailleurs. 


En somme, la tâche du mouvement ouvrier devrait être d’articuler les luttes et de combler les divisions et les fractures que le capitalisme dresse entre nous. Ce ne sont pas les femmes travailleuses, avec leurs revendications, qui créent ces fractures, elles les affrontent au contraire et les articulent dans une dynamique d’unité. Il est donc erroné – d’un point de vue tactique et stratégique – d’envisager que le féminisme est essentiellement bourgeois et que les luttes spécifiques des femmes divisent la classe travailleuse. C’est le capitalisme qui divise et qui tire profit de cette fragmentation.

Argument nº 3: « Les luttes spécifiques des femmes excluent les hommes »

Cette affirmation découle, à nouveau, d’une vision réductionniste du féminisme. Il existe des secteurs du féminisme (le courant « radical » ou « différencialiste ») qui revendiquent positivement les valeurs de la féminité et qui conçoivent leur lutte comme une lutte contre le masculin (indépendamment de sa classe, ethnie, nation, etc.). Mais il ne s’agit que de fractions du féminisme et non de sa totalité. En aucun cas, le courant socialiste ne conçoit sa stratégie « contre les hommes ». Notre objectif est d’obtenir l’égalité réelle entre les sexes, d’en finir avec les inégalités et les oppressions qui découlent d’une société patriarcale et de la structure des genres. Comme le disait Kollontaï : il s’agit de parvenir à l’autodétermination réelle de tous et de toutes.

En conséquence, non seulement les hommes n’en sont pas « exclus », mais ils font partie intégrante de notre stratégie de transformation. De fait, eux aussi bénéficieront dans un certain sens de la fin de la société patriarcale. Le corset du genre ne les opprime-t-il donc pas ? Les hommes n’ont-ils donc pas le droit de s’épanouir dans des sphères comme la paternité, l’émotivité et les soins aux personnes ? Pour les féministes socialistes, il s’agit d’une lutte partagée, bien que l’initiative et la direction en incombe aux femmes, qui sont celles qui souffrent de l’oppression d’une manière incomparable du fait de la distribution inégale des charges dans la reproduction de la vie.

De la même manière que dans la lutte des travailleurs-euses migrant(e)s, tous les travailleurs doivent être impliqués, tout on ne déniant pas aux premiers l’initiative parce qu’ils sont ceux qui connaissent le mieux leur situation ; les espaces non mixtes pour les femmes sont nécessaires afin d’élaborer des stratégies à partir de leur propre expérience, ce qui n’empêche nullement que nous ayons là aussi besoin de l’engagement du reste des travailleurs-euses.

Il correspond aux camarades hommes de réclamer leur participation active dans cette lutte et cela n’arrivera que lorsqu’ils atteindront un niveau de conscience et d’engagement suffisant contre le patriarcat. Tant que ce n’est pas le cas, les machistes-léninistes se limitent à s’auto-exclure et à « laisser les choses des femmes aux mains des seules femmes ». Les bons marxistes s’ajoutent à notre cause parce qu’ils comprennent que l’émancipation par rapport au système-genre bénéficiera à la classe dans son ensemble.

Argument nº 4: « Dans nos organisations, on ne discrimine pas les femmes. Nous ne reproduisons pas les dynamiques patriarcales ».

Croire en la pureté et en la neutralité de sa propre organisation est un signe d’idéalisme. Nos organisations mixtes, comme toutes les institutions de la société, sont traversées par la lutte des classes et aussi par les modèles dominants de rapports patriarcaux. Les femmes et les hommes qui rejoignent ces organisations le font avec un bagage de socialisation qui repose sur l’intériorisation de valeurs et de rapports de pouvoir qui agissent à un niveau très inconscient.

Cela n’arrive pas fréquemment que nos camarades hommes nous traitent comme de simples objets sexuels ou nous font dégringoler dans un rôle de subordonnées (bien que certains hommes fassent effectivement cela). Cependant, les structures de nos organisations peuvent reproduire les inégalités de genre préexistantes si nous ne faisons rien pour l’éviter. Dans ce cas ci, ne rien faire importe. Et beaucoup.

Etre conscients de cette réalité signifie de prendre des mesures pour la changer. C’est pour cela que l’action positive, les politiques de quotas, le renforcement de la participation des femmes ou les activités, campagnes et formations sur les thématiques de la lutte contre le patriarcat sont fondamentales. Je partage avec beaucoup de camarades une insatisfaction vis-à-vis du système des quotas et des « listes crémaillères ». Mais cela ne peut pas conduire à ne rien faire, au « laissez-faire ». Les systèmes « méritocratiques », prétendument neutres et aveugles par rapport aux distinctions de classe ou de genre, ne font en réalité rien d’autre que reproduire l’inégalité préexistante. Depuis quand, d’ailleurs, sommes-nous partisans du « laissez-faire » ? Faisons-nous confiance à la « main invisible » ou au marché pour diluer les inégalités sociales ? Après deux siècles de capitalisme, cela ne s’est encore jamais produit.

Ne rien faire par rapport à un problème ne signifie pas qu’on y fait face mais bien qu’on le laisse de côté. C’est pour cela que la lutte contre le patriarcat ne peut pas rester dans le domaine du discours et doit imprégner également nos pratiques. A défaut d’instruments plus parfaits contre les divisions de classe et de genre (y compris au sein de nos propres organisations), nous devons nécessairement utiliser les quelques instruments dont nous disposons : l’action positive, l’ouverture d’espaces sectoriels de lutte contre le patriarcat, la promotion active de la participation des femmes. Les instruments d’action positive interne ont un certain nombre d’avantages ;

  • Ils aident à valoriser le travail des camarades femmes
  • Ils créent des référents féminins
  • Ils démentent les stéréotypes comme « les quotas augmentent les charges pour des personnes moins qualifiées »
  • Ils améliorent et rendent plus efficaces les processus d’élection et/ou de sélection des charges et des responsabilités
  • Les femmes augmentent leur confiance et formation vis-à-vis de l’accomplissement de fonctions

Nous devons passer du discours à la pratique. En définitive, les organisations doivent prendre en compte et affronter une tare historique qui a également des conséquences formelles et inconscientes dans les espaces de lutte.

Argument nº 5: « Les hommes sont persécutés, on a supprimé notre présomption d’innocence. Les hommes souffrent de la violence de genre autant que les femmes ».

Bien souvent, les conversations sur les rapports entre le féminisme et le marxisme conduisent à des questions d’actualité comme la violence de genre, le divorce, la tutelle parentale ou l’avortement. Le machiste-léniniste met souvent sur la table une série d’arguments et de données qui semblent provenir tout droit de « Intereconomia » ou de « Libertad Digital ». Ces données sont censées démontrer comment la tendance historique se serait inversée à cause du féminisme institutionnel : aujourd’hui, ce sont les hommes qui sont opprimés par les femmes. Ce sont eux qui sont, aujourd’hui, les victimes du matriarcat. Dans ce même acabit, il n’est pas rare d’entendre des choses comme « aujourd’hui les hommes sont persécutés » ; « on ne respecte pas notre présomption d’innocence » ; ou encore « les hommes souffrent encore plus de la violence de genre ». 

La législation récemment introduite par le gouvernement de Zapatero  (« LO 1/2004 : Mesures de Protection Intégrale contre la Violence de Genre ») a ouvert le débat sur l’affaiblissement de la présomption d’innocence et des fausses plaintes dans les cas de violence machiste. Il suffit d’une brève recherche avec Google pour trouver des centaines d’entrées sur la question des fausses plaintes prétendument utilisées par les femmes. Il est possible que de tels cas individuels surviennent, mais les données démontrent que le nombre de fausses dénonciations pour faits de violence de genre n’est pas supérieur à celles que l’on peut trouver pour d’autres délits. Ainsi, en 2010, on a calculé que seulement 0,01% des plaintes pour violence de genre étaient fausses (données du Ministère de la Justice, 2010). Ce débat ne mérite donc pas qu’on s’y attarde : le nombre des fausses plaintes est minime.

En outre, on argumente souvent que les procès de cas de violence de genre entraînent une inversion de la charge de la preuve au détriment du maltraiteur (3) et qu’on vulnérabilise la présomption d’innocence. Ces accusations sont inexactes à la lecture de la Loi Intégrale sur la Violence de Genre elle-même (4). Si nous lisons cette loi – chose qu’on ne fait pas souvent – on constate que dans la procédure judiciaire le traitement des preuves suit la même voie que dans tout autre procès au pénal. Les seules spécificités sont les mesures judiciaires de protection et de sécurité de la victime (éloignement, suspension de la tutelle paternelle, etc.) et le durcissement des peines pour agression. Concrètement : on active une procédure judiciaire rapide et le juge de garde adopte des mesures de précaution pour le risque qu’assume la victime de mauvais traitements. Ces mesures de précaution, préalables au jugement, sont justifiées par la possibilité d’une réédition de la violence. Il suffit de rappeler le cas d’Ana Orantes (5) qui fut brûlée vive par son mari après s’être plainte auprès de la justice et dans les médias. De là découle la nécessité d’adopter des mesures de précaution efficaces. Il peut se produire des excès, comme dans tout procès au pénal, mais on ne peut pas conclure qu’il existe une vulnération de la présomption d’innocence ou un type de persécution.

Une autre question, intéressante celle-là, serait d’évaluer dans quelle mesure une loi comme celle-ci contribue à en finir avec la violence de genre. La loi s’attaque effectivement à une situation désespérée et critique : le féminicide et la violence machiste dans les relations de couple. Cependant, à partir du féminisme socialiste, nous comprenons que c’est insuffisant, qu’il faut aller à la racine des choses.

Tant que les femmes subiront des situations de vulnérabilité, d’inégalité et de dépendance, la violence dont nous souffrons sera un fait quotidien. C’est ce que Zizek appelle la violence subjective et la violence objective. La première est celle qui dépasse le niveau de normalité, le niveau 0 de violence ; par exemple l’assassinat d’une femme par son ex-compagnon. La violence objective est celle qu’exerce quotidiennement le système : c’est la surexploitation, la double journée de travail, la réduction à un simple objet sexuel, la domination psychologique, etc. Tant que nous ne supprimerons pas cette violence subjective ou structurelle dont souffrent les femmes jour après jour, les mauvais traitements continueront d’être la pointe de l’iceberg car ils sont la conséquence d’une domination préalable, prolongée et cumulative.

Il est urgent, dans ce cadre, que le féminisme socialiste fasse une dure critique du féminisme institutionnel. Le nombre annuel de femmes assassinées par leurs maris n’est rien d’autre que le symptôme d’une oppression beaucoup plus silencieuse et profonde : un système de domination intimement lié au mode de production et de reproduction. Cependant, l’insuffisance du féminisme institutionnel (encore plus dans le contexte de la globalisation capitaliste qui réduit la capacité d’intervention des pouvoirs publics) n’entraîne pas le rejet des réformes positives. La Loi sur la Violence de Genre est insuffisante mais elle n’est pas mauvaise en soi. De la même manière, sur le terrain du travail, nous revendiquons les 35 heures même si cela nous semble insuffisant pour en finir avec l’exploitation. Les marxistes doivent appliquer cette même dialectique de la réforme et de la révolution, du programme minimum et maximum, lorsqu’il s’agit d’affronter la question de la lutte contre le patriarcat.


En guise de conclusion : pour une approche marxiste du système sexe-genre

Bien entendu, les rapports entre le marxisme et le féminisme, tant dans la théorie que dans la pratique, ont souvent été des rapports conflictuels. Comme le disait déjà Heidi Hartmann, il s’agit d’un mariage malheureux. Le marxisme est une méthodologie pour comprendre et transformer la société capitaliste. En conséquence, aborder la question du patriarcat et des rapports de sexe-genre est une nécessité incontournable pour toute politique émancipatrice.

Quand le capitalisme industriel a émergé, il s’est trouvé avec un système de sexe-genre qui subordonnait les femmes comme une simple propriété du père de famille. Cette structure de rapports préexistants est entrée en friction avec le capitalisme, elle fut remodelée par lui et est aujourd’hui complètement subsumée par la logique du capital. Ce dernier utilise la domination de genre pour surexploiter, diviser, se reproduire et alimenter son contrôle idéologique. Le patriarcat, ou le système de domination du sexe-genre masculin sur le féminin est une structure de rapports matériels, économiques et idéologiques ; des rapports qui sont toujours en vigueur – même s’ils sont soumis à la critique – dans les pays impérialistes. Les données déjà citées en témoignent.

Ce que nous appelons le nouveau machisme-léninisme est une attitude réactionnaire et idéaliste qui nie cette réalité. Avec le prétexte que le féminisme serait une idéologie bourgeoise, il ignore le système de domination de genre qu’à articulé – et que continue à articuler – le capitalisme. Il ignore les processus plus fondamentaux de production et de reproduction de la vie et leur insertion dans la logique du capital. Il ignore et fait obstacle à l’émancipation des femmes travailleuses. Ce n’est seulement qu’en prenant au sérieux l’articulation de classe et de genre que nous pourrons offrir une issue sensée et émancipatrice à l’autre moitié des travailleurs. Ne permettons pas, cette fois encore, que le capitalisme nous divise.

Source :
 traduction pour www.Avanti4.behttp://www.avanti4.be : Ataulfo Riera
Notes :

(1) En 1920, Clara Zetkin a rencontré Lénine et l’a informée des de l’organisation des prostituées et des activités de formation en éducation sexuelle et matrimoniale avec les ouvrières allemandes. Au cours de l’entrevue, Lénine a qualifié sans détours de « déviation malsaine » le travail mené avec les prostituées et a    traité avec mépris le travail d’éducation sexuelle et familiale avec les ouvrières. Ces activités, selon lui, étaient une perte de temps. Voir dans WEINBAUM, B.: « El curioso noviazgo entre feminismo y socialismo », S. XXI, Madrid, 1984.
(2) Enquête de Structure Salariale, juin 2010, Institut National de Statistiques.
(3) Et nous disons « maltraiteur » au masculin, parce que l’immense majorité des agresseurs dans le cadre intrafamilial, dans les couples ou dans les ex-couples, est constituée par des hommes. Bien que les estimations soient très controversées (voir, par exemple, Raquel Osborne, « De la violencia de género a las cifras de la violencia: una cuestión política »), il est évident que les femmes souffrent majoritairement des mauvais traitements dans le couple ou l’ex-couple, de là le fait que 73 femmes ont été assassinées par leur compagnon ou ex-compagnon (2010) face à 7 hommes.



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